Avec la religion et la guerre, la chasse est sans doute le thème le plus représenté dans l’art, à commencer par les peintures rupestres de la grotte de Lascaux en Dordogne représentant gibiers chassés (cerfs, aurochs, bisons, bouquetins et mammouths) et armes de jet. En cette Journée Mondiale de l’Art, nous vous proposons un petit inventaire des monuments et œuvres cynégétiques les plus marquantes.
Les monuments historiques
Commençons notre périple au Pavillon de chasse dans la forêt de Dreux en Eure-et-Loir. Le comte d’Eu, Louis-Charles de Bourbon le fit bâtir en 1756 pour accueillir ses rendez-vous de chasse à courre et à tir, d’où sa forme octogonale. Depuis 1962, il est classé monument historique.
Poursuivons notre promenade au Château-Musée de Gien. Construit en 1482 par la fille de Louis XI, il figure parmi les tous premiers châteaux de la Loire. Son architecture, mi médiévale et mi Renaissance lui confère la protection au titre de monument historique dès 1840. Construit à l’emplacement d’un ancien rendez-vous de chasse, il abrite naturellement depuis 1952, un Musée de la chasse, riche en objets d’arts et armes de chasse.
Autre Musée : l’Hôtel particulier de Guénégaud situé dans le quartier des Marais à Paris qui est l’une des rares constructions civiles de François Mansart datant du XVIIème siècle. Accueillant tour à tour des logements, des boutiques ou des ateliers, il abrite aujourd’hui le Musée de la Chasse et de la Nature ainsi que le siège de la Fondation de François Sommer. A propos, saviez-vous que la Fondation François Sommer attribue tous les ans, avec la Fondation pour les Monuments Historiques, un prix de 20 000 € pour la restauration du patrimoine lié à la chasse et la pêche ? En 2019, c’est le château de la Ferté-Imbault dans le Loir-et-Cher qui a remporté le premier Prix pour la restauration de ses écuries.
Enfin, nous ne pouvions terminer notre tour opérateur des édifices cynégétiques sans parler du Château de Chambord qui est sans conteste, le monument le plus emblématique des amoureux des arts et de la chasse. Edifié à partir de 1519 par François Ier, son escalier à doubles révolutions demeure l’élément architectural le plus spectaculaire rappelant le génie de Léonard de Vinci. Son domaine forestier de 5 440 hectares abritant cerfs, mouflons et sangliers attire aussi nombre de visiteurs, chasseurs et non chasseurs.
Les peintures
L’une des principales sources d’inspiration des peintres antiques mais aussi modernes, est l’épisode mythologique de la chasse au sanglier de Calydon décrit comme « un sanglier si énorme que l’Épire herbeuse n’a pas de taureaux plus grands ». Afin de débarrasser la région de ce fléau, Œnée, roi de Calydon demanda assistance à de nombreux héros dont son propre fils, Méléagre qui porta à la bête, le coup fatal.
On retrouve cette célèbre chasse chez les peintres Peter Paul Rubens, Frans Snyders, Paul Bril, Nicolaes Berghem, Pellegro Piola, Diégo Vélazquez et Alexandre-François Deportes. D’autres scènes de chasse sont également représentées sur toiles. Parmi les plus connues, nous pouvons citer :
- « Les Chasses au cerf » de Frans Snyders, Paul de Vos, Jacob Ruysdaël, Jacques d’Arthois, Paul et Mat Bril, Jan Frans van Bloemen, Philips Wouwerman, Alexandre-François Desportes, Pierre Denis Martin et de Gustave Courbet.
- « La Chasse au renard » de Alexandre-François Desportes.
- « La Chasse au mouflon » d’Horace Vernet.
- « La Chasse au lièvre » de Woumerman.
- « La Chasse au chevreuil » de Jan Fyt.
- « Les Chasses au loup » de Peter Paul Rubens, Alexandre-François Desportes et Jean-Baptiste Oudry.
- « Les Chasses à l’ours » de Frans Snyders, de Jan Fyt, Jean-Jacques Bachelier.
- « Les Chasses exotiques (lion ou tigre) » de Peter Paul Rubens, Frans Snyders, Jean-Jacques Bachelier et Eugène Delacroix.
Le personnage-même du chasseur a lui aussi inspiré nombres d’artistes-peintres. Nous pouvons citer parmi eux :
- « Le Chasseur endormi» de Gabriel Metsu
- « La Halte de chasseurs « de Wouwerman
- « Le Chasseur au marais» et « Les Chasseurs au miroir » d’Alexandre Decamps
A la Renaissance, c’est le portrait royal en tenue de chasse qui est particulièrement répandu ; le premier ayant initié cette mode étant François Ier, roi de France. Au XVIIème et au XVIIIème siècle, la tendance est plutôt à la peinture animalière. Louis XIV fait peindre ses chiens de chasse par Alexandre-François Desportes tandis que Jean-Baptiste Siméon Chardin préfère peindre du gibier mort. Aux XIXème et XXème siècles, d’autres maîtres font vivre l’art animalier comme Léon Danchin et ses chiens d’arrêt, Roger Reboussin et ses Oiseaux de France, ou encore Karl Reille avec ses aquarelles de vénerie.
Les sculptures et les bronzes
L’Antiquité fait dans ses mosaïques et ses sculptures, une large place à Artémis et Diane, déesses de la chasse mais aussi, à la chasse au Sanglier, passage obligé pour prouver sa virilité.
Au XVIIIème siècle, les bronzes d’Antoine-Louis Barye viendront plutôt illustrer des animaux dans un style quasi documentaire : faisan marchant, braque à l’arrêt, lapin oreilles dressées, etc.
A la même époque, nous pouvons aussi signaler le bronze d’Auguste Louis Marie Ottin : « le Chasseur surpris par un boa » (1857), le marbre de Louis Petitot : « un Chasseur blessé par un serpent » (1827) et celui d’Antoine Laurent Dantan, dit Dantan Aîné : « un Jeune chasseur jouant avec son chien » (1833)… Véritables hymne à la ruralité.
L’écriture
Le premier livre portant sur la chasse est « Le Livre de chasse » de Gaston Phébus, comte de Foix, écrit entre 1387 et 1389 pour Philippe le Hardi, duc de Bourgogne. Il est considéré comme l’ouvrage de référence jusqu’au XIXème siècle.
Au XXème siècle, c’est un certain Marcel Couturier, chirurgien, alpiniste, naturaliste mais aussi… chasseur isérois (originaire de Coublevie) qui nous léguera nombre de récits sur le gibier de montagne. En 1937, il soutiendra notamment une thèse intitulée « Contribution à l’histoire naturelle du chamois » à la faculté de Grenoble. L’année suivante, il publiera « Le Chamois », récompensée par l’Académie des sciences.
Dans un style plus littéraire, nous citerons aussi les chefs d’œuvre de :
- Dix heures en chasse, un récit autobiographique écrit par Jules Verne en 1881 qui relate ses déboires de chasseur.
- La Bécasse de Guy de Maupassant, une nouvelle datant de 1882 qui raconte l’histoire du vieux baron des Ravots, paralysé et donc, privé de chasse qui, à l’ouverture, convie tous les chasseurs des environs sur son domaine pour chasser et manger la bécasse.
- Tartarin de Tarascon d’Alphonse Daudet, un roman en 3 tomes écrit entre 1872 et 1890 qui décrit les aventures d’un antihéros, Tartarin allant chasser le lion en Algérie.
- Raboliot de Maurice Genevoix publié en 1925 évoquant la vie d’un braconnier en Sologne, récompensé du prix Goncourt en 1925.
Cette liste n’est bien sûr, pas exhaustive…
La musique
D’après Elzéar Blaze, auteur cynégétique du XIXème siècle : « C’est à la chasse que la musique doit son origine. »
Au Moyen Âge, ce sont les cornures informant les chasseurs, qui font office de musique avec la quête, le lancé et l’hallali. Cette musique inspire d’ailleurs des compositeurs à la Renaissance comme Clément Janequin dans « La Chasse » (1529) où il imite même les récris de la meute !
Plus tard, Vivaldi, dans le troisième mouvement des « Quatre saisons » reprend des phrases de trompe de chasse.
Au XVIIème et au XVIIIème siècle, l’invention du cor en cuivre ou en laiton élargirent le répertoire. Avec le marquis de Dampierre, grand veneur de Louis XV, de nombreuses fanfares décrivant les circonstances de chasse sont ensuite créées. Lully en fait d’ailleurs des thèmes d’orchestre.
En 1709, Jean-Baptiste Morin crée un ballet intitulé « La Chasse du cerf » dans lequel la trompe de chasse tient le registre principal. Corrette, Mouret, Rameau et Haendel l’imitent. Jean-Sébastien Bach, en personne (!) suit le mouvement et compose une cantate de chasse pour deux trompes en ré.
Au XIXème siècle, tous les grands orchestres d’Europe comptent au moins deux cornistes. En 1826, Rossini écrit ainsi un Rendez-vous de chasse, grande fanfare pour quatre cors à la Dampierre.
Plus tard, la trompe revient à un répertoire exclusivement cynégétique mais c’est encore elle qui annonce le retour de la chasse de Siegfried, dans Le Crépuscule des dieux de Wagner.
Sources :
- Cosmovisions
- Universalis