La maladie d’Aujesky, maladie virale identifiée en 1902 par un vétérinaire Hongrois (M. Aujeszky), a été révélée grâce à l’intensification de l’élevage porcin, notamment dans l’Ouest de la France. Les symptômes sont des signes nerveux d’encéphalite, des convulsions et des tremblements. La mort intervient rapidement chez les sujets contaminés. Si elle n’est pas transmissible à l’Homme, elle est à l’inverse, pour les sangliers et les chiens de chasse. Notre expert national, Pierre Zacharie nous livre ici ses connaissances sur le sujet.
Les voies de contamination
Les voies de contmination de la maladie d’Aujesky sont multiples : par contact direct (groin à groin, saillie, lait des femelles) ou indirect (bâtiments, matériels, alimentation).
Suite à des abattages massifs dans l’élevage porcin, la France était indemne de maladie en 2008. Cependant, depuis 2018, plusieurs cas en élevages de plein air sont apparus dans les départements des Pyrénées Atlantiques, de Meurthe-et-Moselle, dans les Alpes de Haute-Provence, dans le Vaucluse et dernièrement, en Haute-Garonne et dans l‘Allier. Les cas constatés ont fait perdre à la France son statut indemne et a entraîné des pertes économiques nombreuses : abattage d‘animaux et interdiction d‘échanges commerciaux.
Les causes
L’apparition de ces foyers est intimement liée à la présence massive de sangliers autour des élevages. Elle émane aussi de clôtures défaillantes ou inadaptées. Il est fort propable aussi que la mutation génétique du virus accentue sa virulence.
La maladie d’Aujeszky chez le sanglier
La présence de cette maladie chez les suidés sauvages a été mise en évidence depuis plusieurs années que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis. L’infection atteint parfois des pourcentages impressionnants : 26,8% animaux testés positifs en ex–Yougoslavie et 1,7% en Allemagne. En Tunisie, peu d‘élevage porcin sont recensés et pourtant, 63% des animaux ont été touchés par la maladie. Aux Etats-Unis, l’infection des porcs sauvages est très variable d’un état à l’autre : 18% en Georgie, 20% au Texas, 43% en Floride et 85% en Californie. En France, le taux de prévalence (nombre de cas ou de foyers contaminés au cours d’une période donnée) sur ces trois dernières années est le suivant : 21 à 54% en Corse mais également en Ille et Vilaine, dans l‘Aisne, les Ardennes, la Meuse et le Loir et Cher et 6 à 20% pour les départements du Sud dont le Var, sérieusement touché.
Aucun symptôme n’est vraiment constaté chez les sangliers. Le virus se focalise de préférence dans les ganglions lymphatiques, généralement ceux situés au niveau du bassin. Les organes atteints sont l’encéphale, les poumons et les organes génitaux sans pour autant présenter de lésions ou d’anomalies à l’examen initial ou à l’autopsie. Les sangliers ayant été au contact du virus mais en ayant réchappé restent porteurs sains. Il est fort probable aussi que, comme chez le porc, la densité de population favorise la circulation du virus et facilite l’émergence de la maladie chez les chiens de chasse.
La maladie d’Aujeszky chez le chien de chasse
La maladie est apparue chez les chiens de chasse il y a une dizaine d’années notamment dans deux régions : le centre de la France (Loiret) et le Nord–Est (Ardennes, Meuse, Marne). Plusieurs cas ont été également diagnostiqués récemment dans la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur et le Languedoc Roussillon.
En principe, l’incubation dure de 2 à 5 jours. Chez le chien, la maladie ne touche quasiment que le système nerveux. Le début de l’affection est caractérisé par un changement de comportement : inquiétude, apathie et hypersensibilité cutanée. Ensuite, la maladie se traduit par des démangeaisons intenses. Le chien se gratte violemment au point d’entrée du virus surtout au niveau du museau, des babines et de la gueule jusqu’à provoquer de graves plaies pouvant aller jusqu’à l’automutilation. L’évolution se traduit par une paralysie du larynx, une hypersalivation et des problèmes respiratoires. Le chien n’est pas agressif mais l’évolution est fatale en 36 heures.
Annuellement, 12 à 15 cas sont déclarés et reconnus comme tels avec confirmation en laboratoire. Dans tous les cas constatés, les chiens avaient soit participé à une chasse aux sangliers les jours précédents ou reçu une alimentation à base de sanglier. Outre la voie alimentaire comme mode de contamination, il existe une voie cutanée liée à la présence d’une plaie. C’est le cas lors de batailles entre chiens et sangliers ou lorsque les chiens « pillent » le gibier mort.
Si empêcher les batailles entre chiens et sangliers reste complétement illusoire, vous pouvez en revanche agir sur l’alimentation de vos chiens en banissant la viande et les abats crus de sanglier ou cas échéant, les distribuer cuits. Ce principe est absolument à respecter et facile à appliquer car il n’existe aucun traitement pour la maladie, ni aucun vaccin.
Force est de constater que la circulation silencieuse du virus chez certaines populations de sangliers est une réalité. La lutte contre cette maladie chez les suidés sauvages est hélas bien plus difficile à mettre en place que chez le porc. Le chien de chasse joue le rôle de sentinelle de la circulation à bas bruit de cette maladie. Il est à la fois la victime passive et le révélateur de la contamination virale de certaines zones à sangliers.
Pierre ZACHARIE
Ingénieur des Services Vétérinaires
Expert référent en pathologies des Grands Gibiers et en hygiène de la venaison